Présentation des faits 1
Une SPRL exerce l'activité d'agent immobilier à Bruxelles. Une personne achète « sur plan » un appartement à construire. Un compromis de vente est signé entre le promoteur et l'acquéreur. L'acquéreur soutient qu'il s'est basé sur la documentation disponible sur le site Internet de l'agence immobilière, laquelle mentionne une surface habitable de 103 m2.
Onze mois après la signature du compromis, l'acquéreur s'adresse au promoteur pour obtenir les plans de l'appartement avec la mesure de chaque mur. Il se rend alors compte que l'appartement offre une surface habitable de 89 m2, inférieure aux 103 m2 qu'il croyait avoir acquis.
Quelques jours plus tard, l'agence immobilière envoie un courrier à l'acquéreur dans lequel elle lui précise que la surface brute de l'appartement vendu est estimée à 103 m2. Le lendemain, les informations figurant sur le site Internet de l'agence immobilière sont modifiées en ce que la mention « surface habitable » est remplacée par la mention « surface brute ».
L'acquéreur décide dès lors de mettre en demeure l'agence, estimant avoir été trompé par les informations figurant sur le site et mentionnant une surface habitable de 103 m2. Le promoteur lui propose de reprendre le bien vendu moyennant remboursement.
L'acquéreur refuse et cite en justice l'agence immobilière et son assureur afin de demander réparation de son préjudice consistant à avoir payé un prix pour 103 m2 alors qu'il ne disposait que de 89 m2.
Décision du Tribunal de première instance de Bruxelles
Le tribunal constate que le seul document soumis à l'acheteur qui fait référence à la superficie de 103 m2 est la « surface habitable » annoncée par l'agence sur son site Internet. La superficie du bien vendu ne figure sur aucun autre document communiqué tant pendant la phase précontractuelle, que lors de la passation du compromis de vente et de l'acte authentique.
L'agence soutient cependant que l'acquéreur se serait vu remettre les plans d'architecte lors des négociations préalables à la signature du compromis. Le tribunal observe que ces plans n'ont été communiqués que par « extraits » et se contentent de mentionner qu'ils sont établis à l'échelle 1/50e sans faire référence nommément à la superficie habitable. Par conséquent, le Tribunal estime que la confusion entretenue par l'agence sur la surface habitable est totale, de sorte qu'il était quasiment impossible pour un acheteur novice, de procéder à un calcul exact de la surface au sol hors murs.
C'est donc à bon droit que l'acheteur soutient que les informations qui lui ont été données manquent de clarté, de précision et de loyauté, avec pour résultat qu'il a été induit en erreur par l'agence immobilière. L'agence immobilière a partant commis une faute extracontractuelle en manquant à ses obligations d'information. Le tribunal condamne l'agence immobilière à réparer le préjudice subi par l'acquéreur en raison de la différence entre la surface habitable présentée et la surface habitable réelle.
Bon à savoir
L'article 53 du Code de déontologie de l'Institut professionnel des agents immobiliers prévoit que l'agent immobilier courtier ne peut, dans sa publicité et ses annonces, induire en erreur les personnes sur la disponibilité et les caractéristiques essentielles des biens qu'il présente 2.
Il en découle que l'agent immobilier a l'obligation de fournir une information claire, loyale et précise sur les caractéristiques du bien à vendre, et plus généralement, sur tous les éléments qui pourraient déterminer le consentement du futur acquéreur 3.
Outre, cette obligation générale d'information, le Code de droit économique interdit toute publicité qui contient des informations fausses sur les caractéristiques principales du produit, ou qui, d'une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, comporte des affirmations, indications ou représentations susceptibles d'induire en erreur le consommateur moyen et de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement 4.
Le Code de droit économique prévoit à cet effet une liste des éléments sur lequel un consommateur peut être trompé 5.
L'interdiction s'applique même si la publicité n'a causé aucun dommage au consommateur et quand bien même l'entreprise n'avait pas l'intention de tromper. Il suffit que la publicité donne une fausse information et soit susceptible d'influencer le comportement économique du consommateur pour qu'elle soit considérée comme déloyale 6.
La notion de publicité au sens du Code de droit économique vise également les annonces de mise en vente ou de location de biens immobiliers insérées dans la presse ou sur Internet 7.
Le Code de droit économique interdit également les omissions trompeuses, c'est-à-dire non seulement la rétention de l'information, mais également le fait de fournir une information de façon peu claire, inintelligible, ambiguë ou à contretemps 8.
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
______________
1. Civ. Bruxelles, 21 septembre 2010, R.G.A.R., 2011/8, p. 14782.
2. Article 53 du Code de déontologie de l'Institut professionnel des agents immobiliers.
3. B. Dubuisson et P. Wéry, La conclusion du contrat de vente par l'entremise d'un agent immobilier et la mise en vente d'un immeuble, Bruxelles, Larcier 2005, p. 39.
4. Article VI. 97 du Code de droit économique.
5. Ibidem.
6. Bruxelles, 8 mai 2008, R.D.C., 2009/8, p. 809 ; J.Ligot ; F. Vanbossele et O. Battard, Les pratiques loyales, Larcier, 2012, Bruxelles, p. 68.
7. B. Louveaux, « [Déontologie] De l'importance d'être précis dans les annonces immobilières: responsabilité de l'agent immobilier, Immobilier, 2012/ 4, p. 7.
8. Article VI. 99 du Code de droit économique.