Présentation des faits 1
G., administrateur chargé de la gestion journalière de la société anonyme B. a introduit une réclamation contre les cotisations à l'impôt des sociétés exercice 2000 (bilan au 31 décembre 1999) et exercice 2001 (bilan au 31décembre 2000) enrôlées au nom de la société B.
En première instance, le juge a déclaré cette requête irrecevable au motif que G. n'avait pas les qualités requises pour introduire cette réclamation au nom de la société B.
La société B. a fait appel de cette décision et a demandé la mise à néant des cotisations litigieuses.
Décision de la Cour d'appel de Liège
La Cour rappelle que, conformément aux articles 17 du Code judiciaire et 366 du Code d'impôt sur les revenus (C.I.R.) 1992, la réclamation contre l'imposition enrôlée à charge d'une société doit être introduite par une personne ayant qualité pour le faire 2. Par conséquent, il y a lieu d'examiner si, à la date de l'introduction de la réclamation contre la cotisation litigieuse, G. avait bien qualité pour introduire ladite réclamation.
A cet égard, la Cour constate que l'article 19 des statuts de la société B. prévoit que « tous les actes qui engagent la société, autres que ceux de la gestion journalière, y compris ceux où interviennent un fonctionnaire public ou un officier ministériel et en justice sont signés par deux administrateurs membres externes de l'Institut des Experts Comptables, lesquels n'auront pas à justifier vis à vis des tiers d'une délibération préalable du conseil ».
Par actes de la gestion journalière, il y a lieu d'entendre ceux qui sont commandés par les besoins de la vie quotidienne de la société et ceux qui, en raison tant de leur peu d'importance que de la nécessité d'une prompte solution, ne justifient pas l'intervention du conseil d'administration lui-même 3.
En l'espèce, la Cour estime qu'eu égard à l'importance de l'imposition contestée, l'introduction d'une réclamation ne peut être considérée comme un acte commandé par les besoins de la vie quotidienne de la société et cela, d'autant plus que le délai de réclamation dont disposait la société lui permettait de réunir le conseil d'administration pour prendre une décision sur l'introduction d'un recours, compte tenu de la taille réduite dudit conseil et de la relative proximité géographique de ses membres.
La société B. soutient néanmoins qu'elle a ratifié l'acte posé par G. La Cour indique qu'une telle ratification a posteriori ne suffit pas à pallier l'absence de qualité au moment de l'introduction de la demande
Seule la preuve de l'existence, au moment de l'introduction de la réclamation, d'un mandat, même verbal, donné à G. par la société B. pourrait pallier l'absence de la signature d'un second administrateur. Or, la société B. ne dispose pas de la preuve qu'elle a conféré un mandat à G. pour introduire une réclamation à son nom.
Il résulte dès lors de ce qui précède que G. n'avait pas la qualité requise pour introduire une réclamation contre les cotisations enrôlées à l'égard de la société B.
En outre, pour être valable, la réclamation doit être signée, la signature constituant un élément essentiel de la réclamation 4. Une signature irrégulière entraîne donc l'irrecevabilité de la réclamation.
La Cour déclare donc la requête introduite par G. irrecevable et confirme, en ce sens, l'arrêt rendu par le premier juge.
Bon à savoir
Une réclamation introduite par une société à l'encontre d'une cotisation fiscale doit être présentée par la ou les personnes ayant qualité, en vertu des statuts ou de la loi, pour les représenter ou par un mandataire dûment habilité par les personnes autorisées à engager la société 5.
A cet égard, la question de savoir si le pouvoir de représenter la société afin d'introduire une action contre une imposition relève de la gestion journalière dépend de l'importance du litige et de la nécessité d'une réaction rapide 6.
Par conséquent, lorsque l'imposition contestée est relativement importante, l'introduction d'une réclamation relève du conseil d'administration, et ce d'autant plus, lorsque le délai de réclamation dont disposait la société lui permettait de réunir le conseil d'administration pour prendre une décision sur l'introduction d'un recours.
Le conseil d'administration peut toutefois mandater une autre personne pour introduire pareille réclamation. Dans ce cas, la société devra apporter la preuve de ce mandat, même verbal. A cet égard le mandat étant un contrat consensuel, il suffit pour en prouver l'existence envers des tiers que le mandant en confirme l'existence avant que la décision définitive soit rendue. Par conséquent, le mandant peut confirmer l'existence du mandat tendant à l'introduction d'une réclamation, même pour la première fois devant la Cour d'appel saisie du recours fiscal 7.
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1. Liège, 16 janvier 2013, J.D.F., 2015/1-2, p. 22.
2. Article 366 du Code d'impôt sur les revenus (C.I.R.) 1992.
3. Cass., 26 février 2009, R.G. n° F.07.0043.F, site juridat.be).
4. Cass., 6 octobre 2000, Pas. I, p. 526.
5. Civ. Namur n° 1457/12, 1458/12, 20 mars 2014.
6. Bruxelles, 5 décembre 2002, F.J.F. 2003/6, p. 560.
7. Bruxelles, 17 novembre 1995, F.J.F., n°96/73 ; Bruxelles, 30 octobre 1997, F.J.F., n°98/21.