Présentation des faits 1
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 15 novembre 2013 par la Cour d’appel de Bruxelles. La Cour considère que l’appel du demandeur est non fondé et confirme le jugement du premier juge.
En l’espèce, le demandeur se prévalait d'un vice de consentement, soit le dol, à tout le moins l'erreur viciant le consentement et entachant la vente de nullité.
En outre, le demandeur estime que la responsabilité du notaire X et du notaire Y est engagée pour avoir manqué à leur devoir d'information et de conseil.
Le demandeur fait grief aux deux notaires d'avoir indiqué, tant dans le compromis de vente que dans l'acte authentique, que les biens vendus consistaient en 'deux appartements’ alors qu'il s'agissait en réalité d'un rez-de-chaussée ‘affecté’ à usage commercial et de ne pas avoir attiré son attention sur la situation urbanistique des lieux.
En outre, le demandeur reprochait au notaire Y, non seulement de ne pas l'avoir correctement informé, mais également d'avoir établi un acte de base de l'immeuble décrivant des parties privatives n'existant pas.
Décision de la Cour de cassation
La Cour constate que le demandeur a été parfaitement informé de la situation urbanistique du bien dès la signature du compromis de vente, dès lors qu'il y reconnaît avoir reçu une copie de l'acte de base, qui fait lui-même état d'une utilisation de fait du rez-de-chaussée du bien comme commerce et dépôt depuis 1961.
En outre, l'information a été réitérée dans l'acte authentique de vente, dans lequel le demandeur reconnaît avoir reçu une copie de la lettre de la commune du 26 septembre 2002 reprenant les mêmes informations relatives à la destination du bien.
Par ailleurs, le notaire Y a précisé dans deux lettres, l'une adressée au notaire X, le 31 janvier 2005, l'autre au conseil du demandeur, le 2 juin 2006, que la problématique de l'affectation du rez-de-chaussée avait été évoquée avec le demandeur lors de la signature de l'acte authentique.
Ainsi, il apparaît que les notaires ont procédé aux recherches nécessaires, que des contacts préalables entre notaires et parties ont eu lieu et que le demandeur a été adéquatement informé, en manière telle qu'aucune faute dans leur chef n'est établie.
La Cour confirme la décision des premiers juges et, par conséquent, rejette le pourvoi.
Bon à savoir
En vertu de l'article 9, § 1er, de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat 2, modifiée par la loi du 4 mai 1999, le notaire est toujours tenu d'informer entièrement chaque partie des droits, des obligations et des charges découlant des actes juridiques dans lesquels il intervient, et conseille les parties en toute impartialité. 3
Afin d'informer correctement les parties, le notaire doit donc s'informer lui-même, auprès des instances communales, des contraintes urbanistiques qui pèsent sur le bien objet de l'acte. 4
En précisant sa demande de renseignements et en communiquant ceux-ci aux parties à l'acte, le notaire remplit correctement son obligation de conseil. Il ne lui appartient pas, pour le surplus, de vérifier sur place si les constructions érigées l'ont été dans le respect des permis obtenus.
Néanmoins, son devoir particulier d'investigation lui impose par contre de soulever toute question pertinente résultant d'un examen attentif des informations urbanistiques en sa possession et de nature à remettre en cause la régularité de la situation urbanistique de l'immeuble. 5
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
_________________
1. Cass. (1re ch.) RG C.14.0330.F, 12 février 2015 (J.L. / M.T., P.G.) http://www.cass.be.
2. Loi du 4 mai 1999 (loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat).
3. R. Bourseau, La responsabilité professionnelle du notaire, C.U.P., 2001, vol. 50, p. 243 et suivantes.
4. C. Melotte, « La responsabilité professionnelle des notaires », in Responsabilités, Traité théorique et pratique, Titre II/dossier 28, n° 49, p. 19.
5. Voyez : Ch. Vanhalewyn, La responsabilité civile professionnelle du notaire, dix années de jurisprudence, éd. Altoria, 1991, p. 70, n° 23.