Une sûreté est une garantie offerte au créancier qu’il recouvrira la dette souscrite à son débiteur. Cette sûreté peut être tantôt réelle, tantôt personnelle.
Le mécanisme de la sûreté personnelle consiste à adjoindre un deuxième débiteur au débiteur principal pour le cas où ce dernier ne s’exécuterait pas.1
La question s’est ainsi posée de savoir quelle était la situation de la sûreté d’un débiteur failli. Restait-elle tenue à la dette de ce dernier ou en était-elle soulagée ?
La faillite, ainsi que ses conséquences, est régie par la loi sur les faillites du 9 août 1997. Cette loi prévoit, en son article 80, al.3 la règle suivante : « sauf lorsqu’elle a frauduleusement organisé son insolvabilité, le tribunal décharge en tout ou en partie la personne physique qui, à titre gratuit, s’est constituée sûreté personnelle du failli lorsqu’il constate que son obligation est disproportionnée à ses revenus et à son patrimoine ».
Par « sûreté personnelle », le législateur a entendu étendre le bénéfice de la décharge ci-avant énoncée non seulement à la sûreté personnelle au sens strict, comme la caution, mais également aux codébiteurs « dont l’engagement est intervenu en qualité de sûreté personnelle ».2
Quatre conditions sont énoncées par la loi : le caractère personne physique de la sûreté personnelle, le caractère « gratuit » de son engagement, le caractère disproportionné de son obligation par rapport à ses revenus et enfin le dépôt, par la sûreté, d’une déclaration faite en ce sens auprès du tribunal de commerce conformément à l’article 72bis de la loi.3
Le caractère « personne physique » de la sûreté personnelle n’est plus contesté aujourd’hui.4 Ainsi, sont exclues du champ d’application les sûretés personnes morales ainsi que les sûretés réelles.5
Quant à la notion de gratuité, plusieurs arrêts des cours et tribunaux sont venus en préciser la teneur. Ainsi, la Cour d’appel de Liège a, dans un arrêt du 6 mars 2012, a rappelé « qu’il était désormais acquis que le caractère gratuit de la sûreté personnelle doit s'entendre de l'absence de tout avantage économique, tant direct qu'indirect, que la sûreté personnelle peut retirer par la suite de son cautionnement. ».6
Toujours selon cet arrêt, la gratuité doit être appréciée in concreto par le juge. Ainsi, il sera jugé qu’il n’y a pas gratuité dès lors que la sûreté a pu ne serait-ce qu’espérer obtenir un avantage de sa position.7 Pour ce faire, le juge doit se place au moment où le cautionnement est fourni.8
Il faut également une disproportion entre les revenus et le patrimoine de la sûreté et son engagement.9 Cette disproportion doit exister au moment du jugement et ne doit pas nécessairement être manifeste.10 Selon le tribunal de commerce Bruges, « il existe une disproportion (...) lorsque la sûreté n’est plus en mesure de mener une existence conforme à la dignité humaine avec ses revenus et/ou son patrimoine, après avoir rempli son engagement en tant que sûreté avec ces revenus et ce patrimoine. »11
__________
1. Y.-H. Leleu, L. Raucent, « Régimes matrimoniaux - La réforme de 1976 », Rép. not., 2002, p. 428.
2. D. Pasteger, « Le point sur la libération des proches du débiteur failli ou sursitaire », R.D.C., 2014, p. 665 ; Voy. également Comm. Nivelles, 15 juin 2011, J.L.M.B., 2013/4, p. 282 ; Voy. également P. Moreau, « La loi du 20 juillet 2005 et la décharge des personnes qui se sont constituées sûreté personnelle. Nouvelles interrogations ? », R.D.C., 2006, p. 155.
3. S. Notarnicola, « La notion de sûreté personnelle du failli », J.L.M.B., 2009/16, p. 759.
4. A.-A. Henderickx, « La décharge de la sûreté à titre gratuit du failli : le point de la situation actuelle », J.L.M.B., 2013/4, p. 287.
5. M. Lemal, “La faillite”, G.J.E., 2014, p. 69.
6. Liège, 6 mars 2012, J.L.M.B., 2012, p. 1176 ; Voy également Cass., 26 juin 2008, www.cass.be. ; Voy. également S. Notarnicola, « La notion de sûreté personnelle à titre gratuit du failli: la fin d'une controverse?», R.F.D.L., 2009/2, p. 290.
7. Liège, 6 mars 2012, J.L.M.B., 2012, p. 1176.
8. A.-A. Henderickx, op.cit., p. 288.
9. A.-A. Henderickx, op.cit., p. 289.
10. B. Inghels, « Petite histoire d'une grande idée: l'excusabilité », R.D.C.-T.B.H., 2007/4, p. 326.
11. Comm. Bruges, 19 février 2007, R.W., 2008-2009, p. 841 (note sous D. Pasteger, op.cit., p. 665)