La loi sur les faillites prévoit en son article 106 que « peuvent être retenues par le vendeur les marchandises par lui vendues qui ne sont pas délivrées au failli, ou qui n'ont pas encore été expédiées, soit à lui, soit à un tiers pour son compte. »
Dans l’ancien régime, le législateur n’avait pas cru bon de donner une définition exacte de ce qu’il fallait entendre par « droit de rétention ». Selon les auteurs, il s’agissait du droit « conféré au créancier de différer la restitution d’un bien qui lui a été remis par son débiteur tant que sa créance portant sur cette chose n’est pas payée ». [1]
Ce droit vaut dès lors qu’il y a en l’espèce des obligations réciproques c’est-à-dire lorsqu’une personne obligée à l’encontre de son cocontractant est elle-même créancière à son égard. [2] Il permet au créancier-rétenteur de bénéficier d’une garantie constituant moyen de pression pour obtenir paiement de sa créance [3] ainsi que de suspendre d’exécution de son obligation de délivrance.[4]
Notons dès à présent que le droit de rétention porte non seulement sur des obligations contractuelles, mais également sur des obligations légales et extracontractuelles.[5]
Comme pour la clause de réserve de propriété, le droit de rétention a subi certaines modifications dès l’entrée en vigueur de la loi du 11 juillet 2013.
L’article 73 du nouveau chapitre du Code civil prévoit désormais que « le droit de rétention confère au créancier le droit de suspendre la restitution d’un bien qui lui a été remis par son débiteur ou qui est destiné à son débiteur tant que sa créance relative à ce bien n’est pas exécutée. »[6]
Ainsi, le droit de rétention devient une véritable sûreté réelle basée sur la possession du bien grevé [7] de sorte que la dépossession volontaire du bien prive directement le créancier-détenteur de ce droit.[8]
Selon la loi, deux conditions cumulatives sont à remplir à fin de faire naître ce droit de rétention. Il faut, d’une part, que la chose ait été remise au débiteur et, d’autre part, qu’il existe un lien étroit de connexité entre le bien et la créance du rétenteur.[9]
Celui-ci est en principe opposable aux autres créanciers ayant acquis des droits sur le bien après lui.[10] Une des nouveautés introduites par la loi repose sur le fait que ce droit est désormais opposable aux créanciers qui auraient des droits acquis avant lui pour autant que le créancier-rétenteur ait été de bonne foi.[11] Cette dernière possibilité a ainsi consacré une jurisprudence en la matière de la Cour de cassation.[12]
Notons enfin que si le droit de rétention est assimilé au gage sur certains points, notamment sur le fait qu’il donne lieu à un droit de préférence de créancier gagiste[13], il ne l’est pas sur tous. Par exemple, il est unanimement admis que le créancier-rétenteur ne bénéficie pas des droits de réalisation comme ceux prévus par la loi au profit du créancier gagiste. [14]
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[1]V. Nicaise, "Rappels des principes, mise en contexte et modifications diverses apportées par la loi du 25 décembre 2016 », in Les suretés réelles milières, Liège, CUP, 2017, p. 43.
[2] W. Derijcke et F. T’Kint, « La faillite », Rép. not., Tome XII, Le droit commercial et économique, Livre 12, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 245.
[3]G. Rue, « Les limites au droit de rétention », B.S.J., 2013/504, p. 15.
[4]G. Rue, « Le droit de rétention, une arme pour le créancier impayé ? », B.S.J., 2013/492, p. 15.
[5]P. Wéry, « La théorie générale du contrat », Rép. not., Tome IV, Les obligations, Livre 1/1, Bruxelles, Larcier, 2010, p. 823.
[6]F. Georges, « La réforme des sûretés mobilières », Ius & Actores, 2013/3, p. 98.
[7]W. Derijcke, « La réforme des sûretés réelles mobilières »,R.D.C.-T.B.H., 2013/8, p. 719.
[8]C.civ., L.III., t. XVII, art. 74 ; Voy. également J. Cattaruzza, « Les grands axes de la réforme des sûretés mobilières », D.B.F.-B.F.R., 2013/4, p. 194.
[9]C.civ., L.III., t. XVII, art. 74.
[10]C.civ., L.III., t. XVII, art. 75; Voy. également V. Sagaert, « Quelques piliers de la loi sur le gage », HDJ, 2015/4, p. 23.
[11] F. Georges, op.cit., p. 98.
[12] Cass., 15 septembre 2011, R.G. n° C.10.0392.N, www.cass.be .
[13]C.civ., L.III., t. XVII, art. 76.
[14]E. Dirix, La réforme des sûretés réelles mobilières, Limal, Kluwer, 2013,p. 47.