Conformément au principe examiné ci-avant, un tiers ne peut être tenu ni par l'exécution d'obligations découlant d'un contrat auquel il n'est pas partie, ni par la violation des termes de ce contrat. Toutefois, il existe une exception qui est la théorie de la tierce complicité.
Ainsi, un tiers peut engager sa responsabilité extracontractuelle à l'égard d'un cocontractant s'il a participé à la violation du contrat commise par l'autre partie. Dans pareil cas, tant la partie défaillante que le tiers complice peuvent être condamnés à réparer le préjudice subi par l'autre cocontractant. À défaut d'une réparation en nature qui peut prendre la forme d'une annulation de l'acte consacrant la violation du contrat, une réparation par équivalent peut être prononcée par le juge à l'encontre de ces personnes qui seront tenues in solidum 5.
Parmi les exemples de tierce complicité que l'on retrouve dans le milieu des affaires, on peut citer la complicité dans la violation de contrat de distribution, d'une clause de non-concurrence, d'un secret de fabrique ou de commerce ou encore d'une concession de vente 6.
L'application de la théorie de la tierce complicité est soumise à plusieurs conditions. Tout d'abord, il faut que le contrat violé existe et soit valable au moment de la violation. La violation d'un contrat non valable ne peut en aucun cas donner lieu à une rupture de contrat, et dès lors, ne peut donner lieu à une tierce complicité de rupture de contrat 7. La partie qui viole une ou plusieurs de ses obligations contractuelles ne doit pas pouvoir se prévaloir d'une cause d'exonération, auquel cas la violation ne serait pas répréhensible. Ensuite, il faut nécessairement que le tiers ait eu connaissance du contrat et de l'obligation violée. Concrètement, le cocontractant victime de cette violation doit démontrer soit que le tiers avait effectivement connaissance de ces éléments, soit qu'en raison des circonstances de l'espèce, il aurait dû en avoir connaissance 8. Le tiers doit encore avoir collaboré sciemment à la violation de l'obligation en cause 9. Enfin, la partie cocontractante qui se prévaut de la théorie de la tierce complicité doit pouvoir démontrer l'existence d'un dommage qu'elle a subi et qui est en lien causal avec la faute du tiers.
Étant donné que la théorie de la tierce complicité et les effets qu'elle produit constituent une exception au principe de la relativité des contrats, les conditions susmentionnées doivent être interprétées strictement 10. Dans sa jurisprudence, la Cour de cassation rappelle que pour apprécier l'existence d'une tierce complicité, il faut tenir compte de toutes les circonstances concrètes de l'espèce 11.
Un exemple classique de tierce complicité est la situation dans laquelle un tiers se rend complice de la violation d'une clause de réserve de propriété ou d'un pacte de préférence par une des parties au contrat 12.
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5. Cass., 24 novembre 1932, Pas., 1933, I, p. 23.
6. D. Dessard, Les usages honnêtes, Larcier, 2007, p. 227.
7. Président du Tribunal de commerce de Turnhout, 9 décembre 2011, Ann. prat. marché, 2011, p. 587.
8. P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations : Tome I, Bruxelles, Bruylant, 2010, p. 655.
9. Cass., 24 novembre 1932, Pas., 1933, I, p. 23.
10. Appel Gand, 6 juin 2005, Prat. comm., 2005, p. 546.
11. Cass., 19 mai 2005, J.L.M.B., 2005, p. 1449.
12. P. Van Ommeslaghe, op. cit., p. 657.