Le harcèlement moral constitue ce qu'on appelle un délit sur plainte. En effet, l'article 442bis, alinéa 3 du Code pénal, énonce que le harcèlement ne peut faire l'objet de poursuite que pour autant que la personne qui se dit être harcelée ait porté plainte 35.
La plainte de la victime n'est soumise à aucune forme particulière 36. Il n'est donc pas exigé qu'elle se soit constituée partie civile.
Toutefois, il faut que la personne qui se prétende lésée par l'infraction ait clairement fait savoir aux autorités, d'une manière qui ne prête pas à interprétation, qu'elle souhaite des poursuites pénales à l'encontre de l'auteur des faits 37. La simple dénonciation de l'infraction ne constitue donc pas une plainte au sens de l'article 442bis, alinéa 3 du Code pénal lorsque la personne lésée par l'infraction ne demande pas explicitement l'introduction d'une poursuite pénale 38.
Il en résulte que la plainte de la victime doit nécessairement être antérieure à l'exercice de l'action publique, c'est-à-dire avant la saisine du juge d'instruction par le ministère public, ou avant la signification d'une citation directe par le ministère public 39. A défaut, les poursuites seront frappées de nullité 40. Par ailleurs, une plainte déposée après l'intentement de l'action publique n'a pas d'effet régularisateur et n'empêche pas que l'action publique a été irrégulièrement intentée 41.
Par contre, une fois l'action publique intentée, le retrait de la plainte de la victime est sans incidence sur le déroulement de la procédure 42. Seul un désistement avant tout acte de poursuite met un terme à la procédure.
La plainte doit en principe émanée de la victime elle-même. Une plainte de la personne veuve de la victime d'un harcèlement serait donc irrecevable 43. Toutefois, depuis 2011, l'article 442bis, alinéa 2 prévoit que lorsque la victime est en situation de vulnérabilité en raison de l'âge, d'un état de grossesse, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale apparente ou connue, la plainte peut être formulée soit par la victime soit par des établissements d'utilité publique ou des associations visées à l'article 43 de la loi du 26 novembre 2011 44.
Il s'agit de tout établissement d'utilité publique et de toute association jouissant de la personnalité juridique depuis au moins cinq ans à la date des faits et se proposant par statut soit de protéger les victimes de pratiques sectaires, soit de prévenir la violence ou la maltraitance à l'égard de toute personne vulnérable 45. Dans ce cas, la personne vulnérable victime du harcèlement devra donner son accord pour le dépôt de la plainte 46.
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35. Article 442bis al. 3 du Code pénal.
36. Cass., 1 juin 2010, R.G. 10.0155 N.
37. Cass., 11 mars 2008, R.A.B.G., 2008, p. 799.
38. P. Thevissen, « Harcèlement », in Postal Memoralis. Lexique du droit pénal et des lois spéciales, Kluwer, Waterloo, 2012, p. 464.
39. A. De Nauw, Initiation au droit pénal spécial, Kluwer 2008, pp. 349-350.
40. H.-D. Bosly, D. Vandermeersch et M.-A. Beernaert, Droit de la procédure pénale, Bruges, La Charte, 2008, p. 197.
41. P. Thevissen, « Harcèlement », in Postal Memoralis. Lexique du droit pénal et des lois spéciales, Kluwer, Waterloo, 2012, p. 464.
42. J.-P. Colin, « Le harcèlement », in Droit pénal et Procédure pénale, Malines, Kluwer, 2011, p. 135.
43. Bruxelles, Ch. mise en acc., 30 mai 2007, J.T., 2009, p. 87.
44. Article 442bis al. 2 du Code pénal.
45. Article 43 de la loi du 26 novembre 2011 modifiant et complétant le Code pénal en vue d'incriminer l'abus de la situation de faiblesse des personnes et d'étendre la protection pénale des personnes vulnérables contre la maltraitance.
46. P. Thevissen, « Harcèlement », in Postal Memoralis. Lexique du droit pénal et des lois spéciales, Kluwer, Waterloo, 2012, p. 465.