Une dette sociale est un montant du par un individu assujetti à la sécurité sociale à l’Office national de la sécurité sociale.
L’article 26 de l’arrêté royal du 27 décembre 2007 définit, en l’espèce, ce qu’il faut entendre par « dette sociale » au sens de l’article 30bis de la loi du 27 juin 1969.[1] Il y’aura dette sociale lorsque, par exemple, l’entreprise est redevable à l’égard de l’ONSS d’une somme supérieure à 2500€ en cotisations, majorations, indemnités forfaitaires, intérêts de retard ou frais judiciaires.
La loi du 27 juin 1969, entrée en vigueur le 1er janvier 2008, dispose que sont solidaires au paiement des dettes sociales de leur cocontractant, le donneur d’ordre ou l’entrepreneur ayant fait appel à un autre entrepreneur ou à un sous-traitant.[2]
En vertu de cette règle, le donneur d’ordre ou l’entrepreneur doit retenir un montant équivalent à 35% du montant dont il est redevable à son cocontractant, débiteur des dettes sociales envers l’ONSS. Il devra, le cas échéant, reverser cette somme à l’ONSS. [3]
Le montant de la retenue doit être versé à l’ONSS au même moment que le paiement de la facture au cocontractant. [4]
S’il ne s’exécute pas de la sorte, l’entrepreneur ou le donneur de l'arrêtéd’ordre devient solidairement responsable des dettes sociales de son cocontractant. Cette responsabilité est toutefois limitée puisqu’elle est plafonnée soit au prix total, hors TVA, des travaux confiés à son cocontractant, soit à 65% du prix total, hors TVA, des travaux lorsque la responsabilité solidaire a déjà été appliquée sur le plan fiscal dans le chef du même donneur d’ordre ou entrepreneur.[5]
Cette solidarité répond aux règles du Code civil énoncées aux articles 1200 à 1216. En vertu de ces règles, les débiteurs tenus à une même dette peuvent chacun être contraints au paiement de l’intégralité de la dette de sorte que cela libère tous les autres débiteurs.[6]
L’article 30bis, §5 précise que lorsque cette obligation n’est pas ou pas correctement effectuée, l’entrepreneur ou le donneur d’ordre devient redevable à l’ONSS d’une majoration égale au montant à payer, outre le montant à verser, étant entendu que cette majoration peut faire l’objet d’une dispense de 50% par l’ONSS si le défaut résulte de circonstances exceptionnelles.[7] Cette réduction de majoration ne peut être opérée que par l’ONSS lui-même.[8]
Il est néanmoins important de mentionner que ce mécanisme ne constitue ni une sanction civile ni une sanction pénale, mais bien un moyen d’assurer le recouvrement des cotisations.[9]
Le mécanisme de la responsabilité solidaire, tel que prévu par l’article 30bis, couvre le secteur de la construction ainsi que tous les travaux immobiliers énoncés à l’article 19, §2 du Code de la taxe sur la valeur ajoutée, mais également les secteurs dits « à risque ». Il s’agit de secteurs sensibles à la fraude fiscale comme les secteurs de la viande et du gardiennage. [10]
Notons que la jurisprudence récente de la Cour constitutionnelle a confirmé la validité des règles énoncées à l’article 30bis au regard des articles 10 et 11 de la Constitution. De plus, eu égard à l’objectif de lutte contre la fraude sociale poursuivi par le législateur, elle a également confirmé la validité de la règle par rapport au principe selon lequel « nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ».[11]
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[1] Arrêté royal portant exécution des articles 400, 401, 403, 404 et 406 du Code des impôts sur les revenus 1992 et de l'article 30bis de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, M.B., 31 décembre 2007.
[2]Loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, M.B., 25 juillet 1969, art. 30bis, §3.
[3] M. Gratia, « Mécanisme de responsabilité solidaire pour les dettes sociales : proportionné à l'objectif de lutte contre la fraude sociale - Arrêt de la Cour constitutionnelle du 25 mai 2016 », Rev. dr. pén. entr., 2017/3, p. 168.
[4] B. Van Braekel, La sécurité sociale des travailleurs salariés, Bruxelles, Éditions Larcier, 2010, p. 381 ; Voy. également M. Gratia, ibidem, p. 168 ; Voy. également D. Dessard, « Contrat d'entreprise de construction », Rép. not., Tome IX, Contrats divers, Livre 8, Bruxelles, Larcier, 2015, n° 95.
[5] B. Van Braekel, ibidem, p. 374.
[6] P. Wéry, Droit des obligations – Volume 2, Bruxelles, Éditions Larcier, 2016, p. 402.
[7] M. Gratia, op.cit., p. 170.
[8] S. Gilson, « Responsabilité solidaire et réduction des majorations », B.S.J., 2016/566, p. 6.
[9]Trib. trav. Charleroi, (5e ch.), 2 avril 2009.
[10]M. Gratia, « Lutte contre la fraude sociale et mécanismes de responsabilité solidaire : évolution de la matière et actualité », Rev. dr. pén. entr., 2013/2-3, p. 37.
[11] C.Const., 25 mai 2016, R.G. n°79/2016.