Comme son nom l’indique, ce divorce repose sur la désunion irrémédiable des conjoints. En vertu de l’article 229 § 1er du Code civil, «La désunion est irrémédiable lorsqu'elle rend raisonnablement impossible la poursuite de la vie commune et la reprise de celle-ci entre eux. » 7
Le juge considéra qu’il y a désunion irrémédiable entre les époux, soit en raison de données factuelles prouvées par au moins un des conjoints 8, soit en raison de l’écoulement d’un certain laps de temps. 9
1. Variantes du divorce pour cause de désunion irrémédiable
En réalité, il y a trois variantes au divorce pour cause de désunion irrémédiable prévues respectivement aux paragraphes 1, 2 et 3 de l’article 229 du Code civil. 10
La première variante est régie par l’article 229 § 1er du Code civil qui dispose que lorsque la désunion est irrémédiable, c’est-à-dire que la désunion empêche les époux de vivre ensemble, le divorce pourra être prononcé si au moins un des deux époux arrive à prouver par toutes voies de droit que la désunion est irrémédiable. 11
A titre d’exemples, ont été considérés par le juge comme prouvant que la désunion entre les époux était irrémédiable les cas suivants : l’adultère 12, l’abandon de la résidence conjugale 13, des lettres contenant des injures 14, un comportement violent condamné par le Tribunal correctionnel à l’égard de son conjoint. 15
La preuve de cette désunion peut être apportée par toutes voies de droit. Ce qui signifie que la désunion peut être prouvée par un constat d’adultère, par des infractions pénales, par des écrits, par des enquêtes, via des attestations ou des certificats, des photocopies, des photographies, des enregistrements, des relevés téléphoniques, des témoignages, un aveu, le serment, les présomptions, les expertises,… 16
La seconde variante du divorce pour cause de désunion irrémédiable est régie par l’article 229 § 2 du Code civil. Il s’agit du divorce demandé conjointement par les époux qui, soit ne sont pas d’accord sur les modalités relatives au divorce, soit ne souhaitent pas divorcer par consentement mutuel. Dans cette hypothèse, le divorce sera déclaré si les époux sont séparés de fait depuis 6 mois. 17
La troisième et dernière variante est réglementée par l’article 229 § 3 du Code civil. Il s’agit de la demande en divorce faite par l’un des deux époux qui ne parvient pas à prouver que la désunion est irrémédiable. Le divorce sera prononcé à condition que les époux soient séparés de fait depuis plus d’un an.
2. Procédure du divorce pour cause de désunion irrémédiable
Le tribunal compétent pour introduire une action en divorce est le Tribunal de première instance. 18 Le juge compétent est celui du lieu de la dernière résidence conjugale des époux.
Toutes demandes de divorce pour cause de désunion irrémédiable peuvent être introduites par une citation ou par une comparution volontaire des époux. 19 Cela étant, la demande peut être introduite par une requête contradictoire lorsque le divorce porte sur l’écoulement du temps (229 § 2 et § 3 du Code civil). 20
Lors de l’audience d’introduction, le juge examinera la demande en divorce. Si la demande consiste à prouver par toutes voies de droit par au moins un époux que la désunion est irrémédiable, le juge prononcera le divorce si le caractère irrémédiable de la désunion est établi. Toutefois, si le défendeur conteste la demande relative aux faits constituant la désunion irrémédiable, l’affaire pourra être remise ou renvoyée au rôle.
Par ailleurs, lorsque l’action en divorce est conjointe, le juge prononcera le divorce si les époux sont séparés de fait depuis plus de six mois. A défaut, ils seront amenés à comparaître devant le juge pour une seconde audience fixée soit directement après l’écoulement du délai de six mois de séparation, soit trois mois après la première comparution devant le juge. Lors des comparutions, les époux devront affirmer qu’ils désirent toujours divorcer et ainsi poursuivre la procédure en divorce. 21
Enfin, si l’audience d’introduction porte sur une demande de divorce pour cause de désunion irrémédiable par l’un des époux, le juge prononcera le divorce si les conjoints sont séparés de fait depuis plus d’un an. Si ce n’est pas le cas, les époux seront convoqués à une deuxième audience un an plus tard ou immédiatement après l’écoulement du délai d’un an de séparation. 22
Dans les trois variantes du divorce pour cause de désunion irrémédiable, les parties disposent d’un mois pour faire appel de la décision à compter de la signification du jugement. Le délai pour se pourvoir en cassation est de trois mois. 23
3. Les mesures provisoires
La procédure de divorce peut parfois durer un certain temps, et ce malgré les modifications législatives récentes ayant pour but d’accélérer la procédure. Il peut ainsi arriver au cours de cette période que certaines questions doivent être traitées de manière urgente. Par conséquent, le législateur a prévu une procédure en référé permettant de régler la situation des époux pendant la procédure de divorce. Il s’agit des mesures provisoires.
Les mesures provisoires peuvent être demandées au président du tribunal de première instance. 24 Ces mesures sont dites provisoires cas elles ne valent que pour la durée de la procédure de divorce et ne peuvent en principe pas avoir un caractère définitif. Ce qui implique qu’elles ne peuvent en principe valoir au-delà du divorce, hormis l’exception des mesures relatives aux enfants. Cela signifie également que ces mesures pourront être revues à tout moment dans l’hypothèse de la survenance d’éléments nouveaux pertinents. 25
Les mesures provisoires peuvent avoir égard aux éléments suivants :
1. Les résidences séparées
Les époux sont libres de choisir leur résidence, mais en cas de litige sur l’attribution du domicile conjugal, le juge devra les départager.
Il sera fait également interdiction aux époux de pénétrer chez l’autre sans son accord, quand bien même l’immeuble appartiendrait à un époux en propriété exclusive ou aux deux époux de manière indivise.
2. Les mesures relatives aux enfants
Dans le cadre d’une séparation ou d’un divorce, plusieurs sortes de différends relatifs aux enfants communs peuvent surgir. Il peut notamment s’agir de désaccord par rapport à l’hébergement des enfants, à l’autorité parentale ou à l’administration des biens de l’enfant. Le critère principalement pris en compte dans l’octroi de mesures provisoires relatives à l’enfant sera l’intérêt de l’enfant, ainsi que le postulat de l’intérêt de l’enfant à entretenir des relations régulières avec chacun de ses parents. 26
3. Les mesures relatives aux biens
Pendant la durée de la procédure de divorce, les époux peuvent solliciter des mesures relatives à leurs biens communs, en vue de protéger ce patrimoine commun ou d’en déterminer la consistance. Il s’agira par exemple de l’interdiction d’aliéner des biens meubles ou immeubles. Il importe peu à cet égard que les biens fassent partie du patrimoine commun ou du patrimoine propre d’un époux.
Lorsque le conflit entre les époux est tel qu’il existe une crainte qu’un des époux détourne certains biens pendant la durée de la séparation ou du procès, le juge pourra ordonner l’apposition de scellés ou l’établissement d’un inventaire des biens des époux.
Le juge pourra de même octroyer la jouissance exclusive d’un bien à l’un ou l’autre époux, sans que cet octroi implique l’attribution définitive du bien concerné à l’un des époux. 27
4. La pension alimentaire pendant la séparation ou le procès
Le devoir de secours entre époux subsiste jusqu’au prononcé du divorce. Cette obligation pourra dès lors se traduire, le cas échéant, par l’octroi d’une pension alimentaire. À cet effet, le juge ne devra pas examiner l’existence d’une faute dans le chef de l’un ou l’autre époux mais devra permettre à l’époux qui demande la pension alimentaire de conserver le même train de vie que s’il n’y avait pas eu de séparation. 28
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7. Article 229 § 1er du Code civil.
8. Article 229 § 1er du Code civil.
9. Article 229 § 2 et 3 du Code civil.
10. Y-H. Leleu, D. Pire, La réforme du divorce: Première analyse de la loi du 27 avril 2007, Bruxelles, Larcier, p. 24.
11. Article 229 § 1er du Code civil.
12. Civ. Nivelles, 13 novembre 2007, J.L.M.B., 2008, p. 341 ; Civ. Audenaerde (7e ch. bis), 23 décembre 2008, R.W., 2008-2009, p. 1741.
13. Civ. Anvers, 19 février 2008, RABG, 2008, p. 730.
14. Gand, 18 novembre 2004, NjW, 2005, p. 469.
15. Civ. Liège, 9 octobre 2007, J.L.M.B., 2008 ; p. 355.
16. A. Duel, J-Ch. Brouwers, Q. Fischer, Le droit du divorce, 4e édition, Bruxelles, Larcier, pp. 72 et suivantes.
17. Y-H. Leleu et D. Pire, op. cit., p. 29.
18. Article 569, 1° du Code judiciaire. Toutefois, nous verrons que le président peut régler les mesures provisoires et urgentes durant la procédure de divorce.
19. Article 700 et 706 du Code judiciaire.
20. Article 1254 du Code judiciaire.
21. Article 1255 du Code judiciaire.
22. Ibidem.
23. S. Louis, « Le nouveau divorce par consentement mutuel »., in La réforme du divorce, première analyse de la loi du 27 avril 2007, Bruxelles, Larcier, 2007, pp. 133 et suivantes.
24. Le président est compétent sur base de l’article 1280 du Code judiciaire.
25. Civ. Mechelen (réf.), 21 juin 2010, T. fam., 2011, p. 323.
26. Tribunal civil Namur (réf.), 20/06/2008, J.L.M.B., 3/2009, p. 134.
27. J-L. Renchon, « La compétence du juge des mesures provisoires de la procédure en divorce à propos de l’attribution ou de la restitution des biens des époux », R.T.D.F., 1/2011, p. 205.
28. Cass., 9 septembre 2004, Pas., I, p. 1283.