Présentation des faits1
Dans le cadre d’une vente d’immeubles, le vendeur a accordé à la Société D. un droit de préférence pour un certain lot d’immeubles.
Le vendeur et la Société R., étant au courant du pacte de préférence, décident de proposer les immeubles à la Société D. pour un « prix irréaliste et très exagéré », en « espérant et même en sachant que la société » D. ne l’accepterait pas.
La Société D., n’a effectivement pas accepté cette offre et un contrat de vente a été conclu entre le vendeur et la société R.
Décision de la Cour
La Cour de Cassation a confirmé la décision des juges d’appel.
Ceux-ci ont considéré que le vendeur a méconnu de manière fautive le droit de préférence de la société D.
De plus, ils ont constaté que la société R. connaissait et devait connaitre l’existence de ce droit et a participé à sa violation ou à tout le moins, y a activement contribué.
Ils décident de prononcer la nullité du contrat de vente intervenu entre le vendeur et la société R.
Bon à savoir
Dans le cadre d’une vente d’immeuble, le pacte de préférence est « une convention par laquelle le vendeur s’engage (…) à donner la préférence au bénéficiaire du pacte (…) »2.
La conclusion de ce pacte fait naître une obligation dans le chef du propriétaire. Le candidat acheteur sera privilégié et aura la possibilité d’acheter l’immeuble de préférence par rapport aux autres candidats.
En cas de manquement à cette obligation, par exemple si le propriétaire vend directement à une tierce personne, le bénéficiaire du pacte ne peut obtenir que des dommages et intérêts si le tiers est de bonne foi.
Par contre, si le tiers avait connaissance de ce pacte, l’annulation de la vente peut être demandée en justice. En effet, le tiers qui participe à la rupture de contrat pourra être rendu responsable sur base des articles 1382 et 1383 du Code civil.
La mauvaise foi du tiers-acquéreur bloque l’acquisition du bien. Il s’agit de l’application de la théorie de la tierce-complicité, autorisant la nullité dans les cas où le tiers est de mauvaise foi3.
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
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1. Cour de cassation, 27 avril 2006, R.W., 2009-10, p. 236.
2. B. KOHL., La vente immobilière. Chronique de jurisprudence 1990-2010, Bruxelles, Larcier, 2012, pp. 48-49.
3. B. TILLEMAN, A. VERBELE et P-Y. VERKINDT, Droit des contrats France – Belgique – 2, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 163.