La saisie immobilière conservatoire sert à empêcher le débiteur de disposer de son bien immeuble au détriment de ses créanciers. Concrètement, le débiteur saisi reste en possession de l'immeuble sur lequel porte la saisie : il peut donc continuer à habiter les lieux et tenter de trouver une solution pour rembourser ses dettes 1. Le débiteur peut jouir de son immeuble en bon père de famille, accomplir tous les actes d'administration et disposer des fruits générés par le bien 2. Par contre, il ne peut plus aliéner le bien qui a fait l'objet de la saisie, c'est-à-dire qu'il ne peut pas le vendre, le donner en gage, etc…
Lorsque le créancier est sûr et certain que le débiteur ne sera pas en mesure de s'acquitter de ses dettes, il peut décider de transformer la saisie immobilière conservatoire qu'il a antérieurement pratiquée en saisie-exécution. Cette dernière lui permettra dès lors de faire vendre le bien saisi afin d'apurer les dettes du débiteur.
Ce sont les articles 1489 et suivants du Code judiciaire qui organisent cette procédure de transformation. L'objectif du législateur est d'éviter que le créancier ne doive renouveler au stade exécutoire des actes déjà valablement accomplis au stade conservatoire. C'est pourquoi la procédure de transformation dispense le créancier de procéder à la signification coûteuse d'un nouvel acte de saisi.
En effet, l'article 1491 du Code judiciaire prévoit que le jugement sur le fond du litige constitue, à concurrence des condamnations prononcées, le titre exécutoire qui, par sa seule signification, opère transformation de la saisie conservatoire en voie d'exécution 3.
Il résulte de ces dispositions qu'à partir du moment où le créancier qui a fait procéder à l'exécution immobilière conservatoire obtient une décision sur le fond du litige, celle-ci, dès qu'elle sera exécutoire, constituera pour lui le titre qui lui permettra de faire exécuter le jugement et de procéder à l'exécution forcée de la saisie, c'est-à-dire à la vente des biens saisis 4. Il devra toutefois préalablement faire signifier et transcrire un commandement préalable à saisie 5.
Dans le mois de la transcription de ce commandement, le créancier devra présenter une requête au juge des saisies, aux fins de nomination d'un notaire chargé de procéder à l'adjudication de l'immeuble saisi et aux opérations d'ordre 6.
Par ailleurs, l'article 1497 du Code judiciaire énonce qu'en cas de saisie conservatoire, il n'y a pas lieu de procéder à une nouvelle saisie préalablement à l'exécution. Il est, le cas échéant, procédé à celle-ci au moyen du titre exécutoire dont le saisissant est ou sera nanti, et après le commandement en vertu de ce titre.
En d'autres termes, lorsque la saisie conservatoire est pratiquée en vertu d'un jugement de condamnation, ce jugement doit être signifié avec l'exploit de saisie conservatoire. Une fois ce jugement devenu exécutoire, c'est-à-dire non susceptible de recours, le créancier pourra directement passer à l'exécution de la saisie sans avoir à signifier un nouvel exploit de saisie 7.
Toutefois, si au moment de la signification du jugement sur le fond du litige, une action en contestation concernant la régularité de la saisie conservatoire est pendante devant le juge des saisies, la transformation sera retardée jusqu'à la signification de la décision qui reconnaît la régularité de la saisie conservatoire antérieurement pratiquée 8.
Par conséquent, en cas de contestation de la régularité de la saisie conservatoire pratiquée, la transformation de cette dernière en saisie-exécution ne peut survenir qu'à la suite de la double signification de la décision statuant sur le fonds du litige et de la décision du juge des saisies prononçant la régularité de la saisie conservatoire 9.
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1. G. de Leval, La saisie immobilière, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 143.
2. Article 1443 du Code judiciaire.
3. Article 1491 al. 1er du Code judiciaire.
4. Cass. 13 décembre 2001, J.T., 2004/10, p. 204.
5 G. de Leval, Traité des saisies –Règles générales, Liège, Faculté de droit, 1988, n° 281.
6. Article 1580 al. 1er du Code judiciaire.
7. G. de Leval et J. Van Compernolle, « Aperçu des règles communes aux saisies conservatoires et aux voies d'exécution » in Les voies conservatoires et d''exécution – Bilan et perspectives, Bruxelles, éd. Jeune Barreau, 1982, p. 81.
8. Civ. Brux., 30 décembre 2003, N.J.W., 2004, p. 1028 ; Article 1491 al. 3 du Code judiciaire.
9. Civ. Gand, 25 novembre 2008, R.W., 2011-2012, p. 585.