Présentation des faits1
Dans le cadre de l’instruction concernant Monsieur C., inculpé, Madame K., partie civile, a demandé l’accomplissement d’actes d’instruction complémentaires en application de l’article 61quinquies du Code d’instruction criminelle.
La Cour d’appel d’Anvers, chambre des mises en accusation, dans son arrêt rendu le 08 novembre 2010, a déclaré la demande de Madame K. sans objet.
La chambre des mises en accusation a, en effet, d’abord déclaré l’action publique introduite contre Monsieur C. irrecevable car éteinte en raison de la prescription.
Madame K. estime que la chambre des mises en accusation aurait dû examiner si les actes d’instruction complémentaires demandés par Madame K. étaient utiles à la manifestation de la vérité.
C’est pourquoi Madame K. estime que la motivation de la Cour d’appel d’Anvers est équivoque. Elle base également son argument sur le fait que le Juge d’instruction n’a pas ordonné un seul acte d’instruction. Selon la partie civile, la Cour aurait dû s’interroger sur l’utilité des actes d’instruction qu’elle demandait.
Madame K. a dès lors introduit un pourvoi en cassation contre cette décision de la Cour d’appel d’Anvers du 08 novembre 2010.
Dans son moyen, elle invoque la violation des règles concernant la prescription de l’action publique et de l’article 61quinquies du Code d’instruction criminelle, lu en combinaison avec les articles 127 et suivants du Code d’instruction criminelle. À tout le moins, elle invoque la violation de l’article 149 de la Constitution en raison la motivation équivoque donnée par la Cour d’appel.
Décision de la Cour
Concernant la motivation équivoque donnée par la Cour d’appel d’Anvers, la Cour de cassation déclare le moyen irrecevable car il manque de précision en n’indiquant pas en quoi la décision serait légale ou non.
Quant au défaut d’instruction, la Cour de cassation considère le moyen de Madame K. également irrecevable car il n’est pas dirigé contre l’arrêt attaqué.
La Cour commence par rappeler que, en vertu de l’article 127, § 1 du Code d’instruction criminelle, le Juge d’instruction, constatant qu’une cause empêche la poursuite de l’action publique, transmet le dossier au Procureur du roi, afin que ce dernier prenne ses réquisitions en vue du règlement de la procédure par la Chambre du conseil, sauf si ce dernier veut ordonner des devoirs d’instruction complémentaires.
La Cour considère, ensuite, que le Juge d’instruction n’est pas obligé d’ordonner un acte d’instruction avant de communiquer par voie d’ordonnance.
Le Juge d’instruction ainsi que les juridictions d’instruction ne sont, par ailleurs, pas tenus de faire droit à une demande d’accomplissement d’actes d’instruction complémentaires. En effet, lorsque les juridictions d’instruction statuent sur le règlement de la procédure, elles peuvent décider souverainement de l’utilité des actes d’instruction complémentaires.
C’est pourquoi, le moyen de Madame K. critiquant leur appréciation souveraine, est irrecevable.
En effet, lorsque les juridictions d’instruction considèrent qu’il n’y a pas lieu d’ordonner des actes d’instruction complémentaires dès lors que ceux-ci ne sont pas nécessaires à la manifestation de la vérité et que l’action publique est éteinte, les juridictions d’instruction ont régulièrement motivé leur décision.
La Cour d’appel d’Anvers a régulièrement motivé sa décision dès lors qu’elle estime qu’il existe suffisamment de charges pour prouver que Monsieur C. a commis des actes de recel à une date indéterminée entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2000. Les actes d’instruction complémentaires demandés par Madame K. ne sont dès lors pas utiles à la manifestation de la vérité.
De plus, le juge du fond, constatant les faits établis et statuant sur leur bien fondé, est obligé de déclarer l’action publique éteinte.
En conclusion, la Cour de cassation considère que c’est à bon droit que la Cour d’appel a estimé la poursuite de l’instruction inutile. Elle a dès lors régulièrement répondu à la demande d’acte d’instruction complémentaire de Madame K.
Bon à savoir
L’article 61quinquies, § 1 du Code d’instruction criminelle prévoit que « l'inculpé et la partie civile peuvent demander au juge d'instruction l'accomplissement d'un acte d'instruction complémentaire ».
Il convient de donner une définition large au terme « acte d’instruction complémentaire ». Celui-ci couvre en effet tant les actes permettant d’obtenir des informations sur les faits, que sur l’inculpé dans le but de déterminer sa culpabilité ainsi que sur la victime ou les témoins afin de déterminer leur crédibilité2.
Afin d’obtenir un acte d’instruction complémentaire, l’inculpé ou la partie civile doit déposer une requête motivée en ce sens au greffe du tribunal de première instance3.
La requête motivée doit contenir une description détaillée de l’acte d’instruction à accomplir4.
Le Juge d’instruction peut rejeter la requête dans deux cas. Tout d’abord, lorsque l’acte d’instruction complémentaire demandé n’est pas nécessaire à la manifestation de la vérité5. Il peut également refuser lorsque la mesure est préjudiciable à l’instruction6.
Il appartient, en effet, au Juge d’instruction et plus tard aux juridictions d’instruction d’apprécier souverainement si les actes d’instruction complémentaires sont nécessaires à la manifestation de la vérité. Dans le cas où la réponse à cette question serait négative, le Juge d’instruction peut rejeter la demande.
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
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1. Cass. (2e ch.), 31 mai 2011, Pas., 2011, liv. 5, 1563.
2. L. Huybrechts, Twee jaar wet Franchimont, C.B.R., 2000, p. 49.
3. M.-A. Beernaert, C. Guillain et D. Vandermeersch, Introduction à la procédure pénale, Bruxelles, La Charte, 2008, p. 213.
4. Article 61quinquies, § 2 du Code d’instruction criminelle.
5. M.-A. Beernaert, C. Guillain et D. Vandermeersch, op. cit., p. 213.
6. Article 61quinquies, § 3 du Code d’instruction criminelle.