Présentation des faits1
Monsieur E. a tenté de tuer sa femme, Madame F., mais n’a pas été jusqu’au bout de son projet. Il a, en effet, été interrompu par des hurlements et des cris d’enfants.
Monsieur E. a été condamné du chef de tentative meurtre par la Cour d’appel d’Anvers, chambre correctionnelle, par un arrêt rendu le 11 février 2013. Les juges ont en effet considéré qu’il n’avait pas volontairement mis fin à son projet.
Il conteste la qualification de tentative punissable au titre de l’article 51 du Code pénal. En effet, il considère que rien n’indique qu’il n’aurait pas de toute façon interrompu son projet volontairement, même en l’absence des hurlements et des cris d’enfants.
Décision de la Cour
La Cour commence par rappeler qu’il y a tentative punissable lorsque le projet d’infraction a été interrompu par des circonstances extérieures à l’auteur du crime ou du délit, à savoir par exemple la réaction de la victime ou l’intervention d’un tiers.
La Cour estime également qu’il appartient au juge du fond d’apprécier souverainement s’il y a commencement d’exécution ou si les faits constituent plutôt de simples actes préparatoires.
La Cour de cassation, prenant en considération plusieurs éléments, observe que la Cour d’appel a considéré à bon droit que Monsieur E. s’était rendu coupable d’une tentative punissable. En effet, sa volonté de tuer Madame F. a uniquement été interrompue par des circonstances indépendantes de sa volonté, à savoir les cris et les hurlements d’enfants.
Les éléments pris en compte par la Cour d’appel sont les suivants: les mots utilisés par Monsieur E., l’emploi d’une machette, le fait qu’il a frappé Madame E. au cou avec acharnement et enfin le témoignage jugé crédible de Madame E.
La Cour de cassation conclut dès lors que, se basant sur les éléments précités, la Cour d’appel d’Anvers a légalement justifié sa décision. Elle rejette le pourvoi.
Bon à savoir
La tentative est punissable à l’article 51 du Code pénal. Cependant, la tentative n’est punissable que si les actes formant le commencement d’exécution du délit ou du crime ont été interrompus par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur de l’infraction2.
En effet, il est toujours préférable qu’une infraction ne soit pas commise, même si elle est déjà commencée. C’est pourquoi le législateur a voulu laisser la possibilité à l’auteur d’un crime ou d’un délit d’arrêter son projet criminel3.
Qualifier le désistement de l’auteur d’une infraction de volontaire ou non n’est pas toujours aisé. Cette tâche revient aux juges du fond qui se basent sur les circonstances de fait pour motiver leur décision. La Cour de cassation, quant à elle, est compétente pour vérifier si les juges du fond ont pu légalement déduire les conséquences des faits de l’espèce4.
Il est dès lors important que l’auteur des faits ait mis fin spontanément à son projet. Par exemple, la Cour de cassation a considéré qu’était coupable de tentative d’assassinat l’auteur qui avait mis fin à ses actes parce qu’il croyait que la victime était morte car elle ne bougeait plus. Dans ce cas-là, la Cour de cassation a estimé que la Cour d’appel avait eu raison de considérer que le désistement n’était pas volontaire5.
Lorsque l’auteur d’un crime ou d’un délit est interrompu dans la commission de l’infraction par des circonstances extérieures, par exemple les cris ou les hurlements d’enfants, l’abandon du projet criminel n’est pas considéré comme volontaire, mais résulte de circonstances extérieures à la volonté de l’agent.
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
__________________________________
1. Cour de cassation, 11/06/2013, Pas., 2013, p. 1314.
2. Article 51 du Code pénal.
3. C. Hennau et J. Verhaegen, Droit pénal général, Bruxelles, Bruylant, 2003, pp. 183-184.
4. Cass., 26 avril 1946, Pas., I., p. 162 ; Cass., 22 novembre 1976, Pas., 1977, p. 316.
5. Cass., 23 mars 1999, R.D.P.C., 2000, p. 226.