Présentation des faits1
Le 13 décembre 1996, Monsieur A., entrepreneur, a procédé à des fouilles en vue du placement de tuyaux d'égout pour le compte de Monsieur H.
Lors de ces fouilles, il a coupé un câble de 15.000 V du réseau de distribution d'électricité haute tension appartenant à la Société I.
Monsieur A n'a pris aucun contact préalable avec la Société I. avant le début des travaux. Il s'est contenté d'un plan vétuste qui lui fut remis par le maître de l'ouvrage, Monsieur H.
Sur ce plan, les seuls points de repère ont été matérialisés par le point de départ du câble et par une borne située au pied du talus de chemin de fer, borne qui n'existait plus et talus qui avait été modifié avant le début des travaux.
La Société I. a sollicité l'indemnisation du dommage à charge de Monsieur A.
Décision de la Cour
La Cour rappelle l'article 192.02 du Règlement Général sur les Installations Electriques qui prescrit qu’«aucun travail de terrassement, de pavage ou autre ne peut être entrepris dans le voisinage d'un câble électrique souterrain sans consultation préalable du propriétaire du sol, de l'autorité qui a la gestion de la voie publique éventuellement empruntée et du propriétaire du câble. La présence ou l'absence des repères prévus à l'article 188 ne dispense pas de cette consultation. Outre cette consultation, l'exécution proprement dite d'un travail ne peut commencer qu'après avoir procédé à la localisation des câbles»2.
L'entrepreneur a donc le devoir de s'informer et d'obtenir une communication des plans, de localiser les câbles sur la base des indications ainsi fournies et de façon générale, il doit agir avec prudence comme se comporterait tout entrepreneur normalement prudent et raisonnable placé dans les mêmes circonstances de fait.
En l’espèce, la Cour considère que Monsieur A a manqué à son obligation de consulter le propriétaire du câble, à savoir la Société I., à qui il aurait dû demander un plan actualisé.
En effet, selon la Cour, le plan déposé par la Société I était en vigueur au moment des faits litigieux et lui aurait permis de localiser le câble.
En effet, alors qu'il disposait d'un plan vétuste dont certains points de repère n'étaient plus conformes à la réalité des lieux (la borne n'existait plus et le talus avait été modifié), Monsieur A s’est contenté d'utiliser un détecteur sans procéder à aucun contrôle par sondage, de façon telle qu'il a localisé et suivi non pas le câble électrique litigieux mais une conduite d'eau.
De la sorte, la Cour estime que Monsieur A. ne s'est pas comporté comme tout entrepreneur normalement prudent et diligent se serait comporté dans les mêmes circonstances.
S’il avait pris contact avec la Société I. afin d'obtenir le plan actualisé et s’il avait procédé à un contrôle du résultat obtenu par le détecteur afin de remplir son obligation de localisation, le sinistre ne serait pas survenu tel qu'il s'est produit.
La Cour considère donc que la demande de la Société I. est fondée à concurrence de 1.995,05 euros, à augmenter des intérêts compensatoires au taux légal depuis le 13 décembre 1996.
Bon à savoir
Comme tous les intervenants à l’acte de construire, l’entrepreneur dispose d’un devoir de conseil à l’égard du maître de l’ouvrage3.
Ce devoir de conseil sera d’autant plus important en l’absence de l’intervention d’un architecte4.
Le corolaire de ce devoir de conseil est le devoir d’information de l’entrepreneur qui ne peut se retrancher derrière le fait qu’il ne connait pas la loi5.
Néanmoins, avant de pouvoir informer le maitre de l’ouvrage afin de lui permettre de décider en pleine connaissance de cause, l’entrepreneur a l’obligation de s’informer lui-même6.
L'article 192.02 du Règlement Général sur les Installations Electriques prescrit qu’«aucun travail de terrassement, de pavage ou autre ne peut être entrepris dans le voisinage d'un câble électrique souterrain sans consultation préalable du propriétaire du sol, de l'autorité qui a la gestion de la voie publique éventuellement empruntée et du propriétaire du câble. La présence ou l'absence des repères prévus à l'article 188 ne dispense pas de cette consultation. Outre cette consultation, l'exécution proprement dite d'un travail ne peut commencer qu'après avoir procédé à la localisation des câbles»7.
L'entrepreneur a donc le devoir de s'informer et d'obtenir une communication des plans, de localiser les câbles sur la base des indications ainsi fournies et de façon générale il doit agir avec prudence comme se comporterait tout entrepreneur normalement prudent et raisonnable placé dans les mêmes circonstances de fait.
Ainsi, l'entrepreneur qui procède, à l'aide d'une pelle mécanique, à des fouilles en vue du placement de tuyaux d'égout, et qui coupe un câble de 15.000 V du réseau de distribution d'électricité haute tension, ne s'est pas comporté comme tout entrepreneur normalement prudent et diligent se serait comporté dans les mêmes circonstances.
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1. Appel Liège, 19 décembre 2007, Bull. ass., 2010, p. 9.
2. Article 192.02 du Règlement Général sur les Installations Electriques
3. A. Delvaux, B. de Cocqueau, R. Simar, B. Devos et J. Bockourt, Le contrat d'entreprise : Chronique de jurisprudence 2001-2011, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 74.
4. P. HENRY et F. POTTIER, « L’architecte et l’entrepreneur face aux infractions d’urbanisme » in Liber amicorum Yvon Hannequart et Roger Rasir, Kluwer, 1997, pp. 179 et s., spéc. P. HENRY et F. POTTIER, « Les constructeurs et les infractions d’urbanisme », Amén., 1997, p. 159.
5. F. GLANSDORFF et P. HENRY, Droit de la responsabilité, Domaines choisis, Liège, 2010, p. 163.
6. A. Delvaux, B. de Cocqueau, R. Simar, B. Devos et J. Bockourt, Le contrat d'entreprise : Chronique de jurisprudence 2001-2011, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 73.
7. Article 192.02 du Règlement Général sur les Installations Electriques